Avenir en Héritage (AEH) est une association d’ECSI basée à la Rochelle en intervenant sur toute la Charente Maritime. Membre du RADSI N-A, AEH vise à encourager la découverte de l’interculturalité, l’autonomie et de l’expérimentation des jeunes, le développement de la citoyenneté et de l’esprit critique à travers des interventions de formation et de sensibilisation auprès d’une grande diversité de publics.
AEH a conçu cette année un outil pédagogique basée sur le jeu de rôle pour faire connaître les enjeux individuels et collectifs liés à la mise en œuvre des 17 ODD à l’échelle de la planète. Rencontre avec Jean Christophe, co-fondateur d’AEH
Quelle est la genèse du projet ?
AEH intervient dans des établissements d’enseignement supérieur, des collèges et des lycées pour former les élèves et les étudiant-es aux enjeux des 17 ODD. Nous intervenons auprès de jeunes sur les questions de mobilité et d’interculturalité, notamment dans le cadre de la préparation au départ en volontariat international. Nous animons également des sensibilisations sur les Droits Humains, qui permettent d’avoir une approche critique des ODD.
Le jeu est un outil important de nos interventions, On a eu envie de croiser ces deux thématiques en créant un nouvel outil. Notre jeu s’inspire de plusieurs jeux pédagogiques et cherche à développer une prise de conscience à plusieurs niveaux :
Individuelle :
Se mettre dans la peau d’un personnage afin de se rendre compte de ce qu’il vit, de son cadre de vie, de ses aspirations mais aussi des contraintes qu’il rencontre dans la réalisation de ses aspirations, de ses Droits fondamentaux. Me ressemble-t-il ? Que signifient les ODD pour lui ?
Nous nous sommes inspirés du jeu du pas en avant, de l’exposition Nés quelque Part qui invitent à se mettre dans la peau d’un protagoniste. De la série de vidéos Ecosphere VR de WWF qui plonge les spectateurs dans les lieux où travaille le WWF. Il s’agit d’une série de vidéos immersives en réalité virtuelle (VR) mettant en lumière les lieux où travaille le WWF et les personnes qui travaillent pour protéger ces lieux. La série en trois parties, intitulée Ecosphere , guide les spectateurs à travers les savanes du Kenya (Afrique), les forêts tropicales de Bornéo (Malaisie) et les récifs coralliens de Raja Ampat (Indonésie).
Collectives :
Il ne s’agit plus d’incarner un personnage mais un pays. Les participants sont les décideurs d’un pays de la planète et doivent développer un projet de société : enjeux, priorité, liens avec les ODD, idées d’actions concrètes
Cap 2030, outil d’animation qui permet d’évaluer ou de concevoir des projets au regard des 17 Objectifs de Développement Durable de l’Agenda 2030 de l’ONU ; l’escape game "MOnd’ Défi pour Demain, c’est maintenant !" développé par Graine Nouvelle-Aquitaine, outil pédagogique permettant de sensibiliser les jeunes aux Objectifs du Développement Durable (ODD) et aux principes de concertation et de coopération.
Entreprenariat : en fonction du temps disponibles, nous accompagnons les participants à imaginer des solutions concrètes, dont la finalité est d’avoir un impact positif sur les plans sociétaux et environnementaux, avec un modèle économique viable. Cela nous permettait de sensibiliser à l’Economie Sociale et Solidaire et à également de développer une approche critique de la solidarité internationale et de certains discours.
Nous avons eu l’idée de ce jeu à la suite d’ateliers de préparation au départ dans le cadre des dispositifs JSI-VVVSI, d’interventions en Grande école, ou lors de formations de volontaires en service civique.
Régulièrement, nous restions un peu sur notre faim car la plupart du temps les participant-es restaient focalisés sur leur propre mission en se demandant ce qu’ils allaient apporter mais rarement ce qu’ils allaient recevoir. Par ailleurs, lors des débriefings que nous organisions, il apparaissait qu’il était très rare que les participants aient eu le réflexe de comprendre les enjeux individuels et collectifs liés à la mise en œuvre des ODD dans les pays d’accueils. Ils partaient exécuter une tâche, et souvent avec beaucoup d’abnégation et de sérieux, mais rares étaient ceux qui étaient sortis du cadre de leur mission pour mieux saisir le quotidien individuel et collectif des habitants : économique, social, environnemental, accès au droit, leur vision du monde. Le dispositif JSI-VVVSI est l’un des rares dispositifs qui promeut la rencontre plutôt que le projet, La conception d’« Un autre monde en 2030 » en 2022 et 2023, que nous l’expérimentons depuis 1 an maintenant entend proposer une réflexion intégrant ces différentes dimensions. Il sera bientôt finalisé et diffusé aux personnes ou associations pour appropriation de l’outil.
En quoi consiste le jeu ?
Le jeu cherche à développer une prise de conscience à plusieurs niveaux à partir d’une découverte des enjeux des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’ONU ; , à comprendre les réalités quotidiennes de femmes et d’hommes de la planète ; à imaginer l’avenir de leur pays en 2030 en élaborant un projet de société des solutions collectives, et. L’objectif est de favoriser la compréhension globale des problématiques mondiales, avec une réflexion approfondie sur les Droits Humains, la justice sociale, et environnementale. Il vise aussi à encourager la collaboration interdisciplinaire et inciter à l’action concrète.
Le jeu peut se dérouler sur une demi journée, comme sur sur plusieurs jours pour un travail beaucoup plus poussé, il est adaptable aux publics et aux contraintes de temps. Il convient toutefois plus à des interventions en milieu éducatif.
Déroulement du jeu :
1ère étape :
Organisation des participants en groupe pays et distributions des cartes pays. Possibilité de choisir un pays qui n’est pas présenté.
Tirage au sort des cartes personnages : » au hasard, parmi un certain nombre de profils (exemple – étudiant-e, retraité-e..) Le personnage de chacune et chacun vit dans le pays dans lequel le participant est placé.
2ème étape
Incarner un personnage :
Durant cette étape, les participants complètent la fiche personnage. Ils précisent ses préoccupations principales, ses rêves, ses ambitions ; ses activités ; ses impossibilités et identifient les ODD qui concernant le plus le personnage.
Pour parfaire l’incarnation : une liste de questions, type pas en avant, est proposée. Idéalement, mais c’est un projet actuellement, cette étape devrait permettre de rencontrer des témoignages soit virtuels, soit présentiel à travers des organismes ou associations représentatives : IDAF, COSIM, RADSI-NA etc.
Le personnage élabore une liste de souhait qu’il aimerait que son Gouvernement prenne en compte. C’est sa vision personnelle d’un autre monde en 2030
3ème étape :
Les participants prennent connaissance de leur carte pays : informations sur le contexte démographique, la situation économique, enjeux politiques etc. Nous mettons à disposition des ressources pour faciliter leur travail de recherche et de collecte d’informations.
1. Rappel des ODD (films, quizz)
1. Rappel de la stratégie française : 6 enjeux, 6 priorités.
2. Focus sur l’ODD 17 : partenariat ?
3. Focus sur l’approche critique de la solidarité internationale : posture individuelle – enjeux de l’aide
4. Un exemple de mise en œuvre : Néo Téra.
2. Diagnostic de la mise en œuvre des ODD dans le pays : tableau à 3 colonnes : Régression-Stagnation-Progression
3. Elaboration d’une SWOT du pays : forces, opportunités, faiblesses, menaces du pays.
4. Elaboration du programme Un autre monde en 20230. Dimension collective. : selon les axes considérés comme étant prioritaires. C’est à ce moment également que les participants ressortent leur carte personnage et veillent à que ses souhaits soient pris en compte. Cela encourage la créativité et la pensée critique sur les actions à entreprendre pour façonner un avenir durable.
Il sera nécessaire à cette étape d’entrer en contact avec les autres pays pour voir si des partenariats peuvent être envisager ou voir si des obstacles existent.
5. Débriefing :
S’interroger sir ce que j’ai découvert : sur le personnage, sur le pays. Sur ce que cela implique en termes de posture, d’idées reçues, de préparation à la mission.
Un témoignage en forme de pastille : si je m’adressais à un jeune qui joue à ce jeu dans un autre pays et qui joue mon rôle : que lui dirais ?
Quelles sont les forces et les limites du jeu ?
C’est un super outil de préparation au départ - les étudiant-es (Jeunes) sont souvent focalisés sur leur propre situation et ne prennent pas le temps de regarder ce qui se passe autour d’eux. Le jeu permet de comprendre la situation du pays dans lequel ils sont en immersion, par rapport aux 17 ODD, d’avoir une vision systémique, comprendre les interdépendances. Il permet de se rendre compte que seul on ne peut rien faire en faisant ressortir l’importance de la coopération entre les pays. Nous l’avons testé plusieurs fois et le retour des étudiants sont plutôt positifs - la dynamique de jeu marche bien.
Point de vigilance : du côté des animateur-ices, ce jeu requiert une connaissance pluridisciplinaire que l’on n’a pas forcément, il faut compter sur les ressources pour avoir un éclairage de la situation économique, socio-géographique d’un pays.
Point d’amélioration : les participant-es peuvent avoir une vision stéréotypée des personnages qu’ils et elles incarnent ce qui va fausser la suite du jeu. C’était une volonté d’aller interroger les préjugés de participant-es mais on a remarqué que ce n’était pas toujours compatible avec les autres objectifs du jeu.
Quelle est la suite du projet ?
D’abord l’améliorer : nous l’avons bien testé auprès de plein de jeunes mais on aimerait le tester avec les membres du RADSI N-A pour avoir un retour de pair à pair et pouvoir le peaufiner. On devra ensuite finaliser le jeu, le cartonner, illustrer les cartes, concevoir le livret pédagogique pour qu’il soit transférable à d’autres acteur-ices...
Enfin, développer une partie numérique : On voudrait permettre à chaque participant de faire une « visite virtuelle » de son pays en écoutant des témoignages d’habitant-es en lien avec la problématique d’un ODD identifié. Cela permettrait de confronter ce qu’on a projeté sur un pays avec des témoignages réels, provenant de partenaires internationaux. Nous aimerions donc travailler avec des partenaires pour obtenir des témoignages dans le monde. Une version à l’échelle de l’Europe est envisagée en s’appuyant sur le réseau Erasmus + et notamment le corps européen de solidarité.
Quels conseils donnerais-tu aux personnes qui souhaitent se lancer dans la conception d’un jeu pédagogique ?
Nous ne sommes pas à la base créateur d’outils, on en utilise beaucoup mais on n’est pas des spécialistes, c’est une première expérience très enrichissante et on peut en tirer les conclusions suivantes :
Raccrocher l’outil à un besoin spécifique, est ce que ça répond à une demande ?
Prendre du temps, ne pas hésiter à le reprendre plusieurs fois
Le tester le plus possible, auprès de jeunes et d’acteurs ECSI, et le réadapter
Accepter de se laisser dérouter par rapport au résultat final que l’on avait imaginé au début.
D’avantage échanger avec d’autres acteur-ices mais cela demande un temps considérable, plus que nous ne l’avions imaginé sur ce premier projet.